Au cours de mon tour de Suisse à bord de mon camping-car Begoodee pour partager les recettes des Suisses libres et positifs, j’ai été contactée par Christian Raymond et son épouse Madeleine qui m’ont envoyé ce fort sympathique message:
“Chère Isabelle,
Ma femme et moi aimerions vous parler d’un bateau porte-bonheur : La Demoiselle.
“La Demoiselle” est une barque du Léman de 30 mètres de long et de 75 tonnes. Avec l’aide de plus d’un millier de bénévoles, nous l’avons construite pour devenir le premier voilier-école de Suisse. Équipée d’une cuisine, de 32 couchettes et de sanitaires, “La Demoiselle” emmène en priorité les enfants des écoles à la découverte du Léman et d’eux-mêmes dans des camps d’une semaine. La Demoiselle est également offerte à la location de chacun pour une simple croisière, un mariage, une fête de famille ou d’entreprise ou pour une simple promenade entre amis. Et une chose est sûre : elle rend ses passagers heureux !
En lisant ces mots, il est clair que “La Demoiselle” avait toute sa place à bord de Joy for Switzerland!
J’ai donc eu l’immense chance de participer à l’une des journées de croisière en compagnie d’une généreuse poignée de bénévoles, à l’occasion de leur “Croisière des impossibles” du samedi 19 septembre au lundi 21 septembre 2020. Christian Raymond l’a baptisée ainsi, car pendant trois jours, ils se sont donné comme objectif d’amarrer la belle barque des endroits compliqués, voire impossible! Et la mission du jour était de rentrer à la voile dans le canal du Vieux Rhône jusqu’au petit port des Grangettes. Un rêve de toujours pour Christian Raymond!
Grand moment d’émotion
Savez-vous ce qui fait parfois l’envergure d’un chef? Dans certains cas, il sait écouter son entourage, dans d’autres, il sait ne pas l’écouter! Surtout quand les conseils extérieurs sont motivés par la crainte! Et le “patron” Christian Raymond n’est pas influençable quand il s’agit de s’offrir un rêve: “Depuis que je navigue sur La Demoiselle, j’ai toujours rêvé d’entrer dans ce merveilleux canal à la voile. Et c’est un sacré défi quand on connait la masse de notre embarcation et la complexité des manoeuvres, toutes exécutées à la main et à l’ancienne”, explique-t-i, excité et joyeux, comme un enfant qui joue dans une flaque d’eau. Malgré quelques membres d’équipages qui ont tenté de l’en dissuader, Christian ne recule jamais devant l’audace et le besoin de beauté! “On arrête le moteur, toutes voiles dehors et on se lance!” hurle le joyeux capitaine aux bateliers.
D’abord, on sent une certaine inquiétude planer dans les airs. Une légère tension, y compris pour le “patron”. Et puis la magie opère. Le voilier file sur l’eau étroite du canal, dans le silence et la contemplation. Les arbres caressent les voiles ou les effleurent d’un doux baiser! Martine, la cambusière, se tient à la proue de la vaillante barque. Elle “écoute” l’instant avec solennité, dans une profonde gratitude, les mains sur le coeur. Des larmes perlent sous ses yeux. Christian, lui aussi, a le regard mouillé. Après 20 minutes où le temps s’est suspendu, le bateau approche du petit port. “Nous avons réussi! Rien n’est impossible pour la belle Demoiselle!”, me dis-je. Tonnerre d’applaudissement sur la bande-son de la série “Mission impossible” qui est jouée momentanément en clin d’oeil humoristique! Je vois en Christian Raymond la pétillance dans le regard de l’enfant qui est resté “vivant” en grandissant, par l’émerveillement et le courage.
Je vous invite aussi à découvrir l’histoire de ce très beau projet qui est aussi parti du rêve de Christian Raymond de construire la réplique historique de l’une des célèbres barques de transport sur le Léman au 19ème siècle, aux couleurs du Valais. Une association faîtière « Voiles Latines du Léman » a été créée en 1998, dans le but de réunir et de promouvoir les différentes barques du Léman existantes autour du lac. Ce navigateur chevronné a également écrit un très beau livre sur les « Voiles Latines du Léman » avec les six barques « Neptune », Vaudoise », « Savoie», «Demoiselle », la cochère « Aurore » et la galère la « Liberté».
En Christian Raymond, j’ai rarement rencontré un personnage qui incarnait si bien cette jolie citation:
“Un adulte créatif est un enfant qui a survécu”.